Partager un fichier via BitTorrent sous Debian

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En image d’illustration, un extrait de la délicieuse pub anti-piratage maintes fois détournée.
Récemment, j’ai du transmettre à une personne une archive d’une centaine de Go, dont le téléchargement derrière un nginx finissait toujours par échouer. J’ai alors décidé de créer un torrent et de le partager depuis mon serveur, et j’ai été étonné du peu de documentation clé en main sur le sujet. Voilà ma petite contribution ; je suis preneur·se si vous trouvez quelque chose d’autre 😉.

Mis à jour le 29 juillet 2024 avec des corrections adaptées pour un usage personnel.

Dans ce qui suit, le fichier partagé n’est pas strictement privé (même s’il est hautement improbable que quelqu’un qui ne détient pas le fichier Torrent puisse l’obtenir) !

Prérequis

On va utiliser Transmission, un client BitTorrent libre très utilisé, qui a l’avantage de proposer une CLI simple d’utilisation et de pouvoir gérer la création de torrents.

Pour rappel, BitTorrent c’est un protocole de partage de fichiers en pair-à-pair. Pas de serveur central, juste des gens avec un ordinateur (pas forcément un serveur) comme vous et moi. C’est intrinsèquement résilient, car si 10 personnes ont une copie du fichier, peu importe si une ou deux s’éteint. La censure ne fonctionne pas dans un tel réseau.

Pour ce faire, on installe deux paquets :

sudo apt install transmission-daemon transmission-cli

Configurer Transmission

Transmission a la fâcheuse habitude d’écraser sa configuration au redémarrage s’il n’est pas arrêté lors de la modification.

Si jamais vous l’aviez lancé, il faut stopper le daemon :

sudo systemctl stop transmission-daemon

Pour nous faciliter la vie, on va changer un paramètre dans le fichier de configuration :

sudo vim /etc/transmission-daemon/settings.json

On passe rpc-authentication-required à false. L’authentification RPC est souvent utilisée pour contrôler Transmission à distance. Ici, on se facilite les commandes.

Pas d’inquiétude, une whitelist par défaut limite l’authentification à localhost, donc si vous avez l’entière maîtrise sur votre serveur, je n’y vois pas d’inconvénient majeur. Après, je ne suis pas læ plus strict·e niveau sécurité 😇.

On redémarre le daemon :

sudo systemctl start transmission-daemon

On peut vérifier sur quel port il écoute :

sudo ss --tcp -pl
ESTAB [...] REDACTED_IP:51413 [...] users:(("transmission-da",pid=3840919,fd=24))

Le port 51413 est le port TCP par défaut de Transmission. Il existe plusieurs mécanismes pour échanger des fichiers via BitTorrent, et ici on utilisera le plus simple : Transmission annoncera qu’on peut contacter notre serveur sur ce port.

Si vous avez un pare-feu restrictif, c’est le moment d’ouvrir le port 51413.

Créer un torrent

Pour créer un torrent avec Transmission, on a besoin de deux choses :

  • Un répertoire ou un fichier à partager ;
  • Une liste de trackers.

Les « trackers » sont des genre d’annuaires où s’enregistrent les pairs possédant tout ou partie des fichiers d’un torrent. Ces pairs sont appelés seeders, ils partagent. Les autres, qui veulent récupérer des fichiers, sont des leechers. Grâce aux trackers, les leechers récupèrent la liste des seeders 🌱. On peut être les deux à la fois d’ailleurs : récupérer un morceau de fichier tout en en partageant un autre.

Une fois cette liste récupérée, la transmission se fait en pair-à-pair ↔️.

Pour les plus curieux·se d’entre vous, il existe aussi une méthode entièrement décentralisée qui repose sur les tables de hachage distribuée.

Il existe des trackers publics et privés. Les trackers publics sont maintenus parfois par des associations, parfois par des individus, parfois on sait pas trop, mais ils sont loin d’être stables : ils peuvent être suspendus ou surchargés. L’idéal est donc d’associer plusieurs trackers publics à un torrent pour être sûr·e qu’au moins un des trackers soit accessible lors du leech. Ça évite aussi le côté « centralisation », pas vraiment compatible avec la philosophie torrent.

Sur ce dépôt, tu trouveras une liste très active des trackers publics fonctionnels.
Edit 29/07/2024 : parfois il est difficile de trouver des trackers qui fonctionnent et ça peut prendre la tête longtemps… Une solution dans ce cas est de lancer opentracker le temps du partage, en whitelistant le hash du torrent à partager pour éviter qu’il ne devienne un tracker public. L’URL http://<IP>:6969/announce sera celle à renseigner pour le tracker, tandis que la même URL avec /stats au lieu de /announce permettra de voir si le torrent est bien annoncé.

Allez, c’est parti ! Imaginons maintenant que tu aies un dossier perfectly-legal que tu souhaites seeder. Voici comment créer le fichier torrent :

# Il semblerait que Transmission ne s'annonce qu'au premier tracker, ce qui semble
# limiter l'intérêt de fournir plusieurs trackers...
transmission-create perfectly-legal -p -t <tracker_1> [-t <tracker_2> ...] -o perfectly-legal.torrent
L’option -p demande au client de ne pas fuiter nos fichiers torrent en cherchant des pairs autrement qu’en passant par le tracker.
Plus le dossier est gros, plus la création du torrent est longue ; plusieurs minutes pour 100Go.

Le torrent ne contient finalement pas grand chose : entre autres, le nom du dossier, la liste des trackers et le hash du torrent, indispensable pour l’identifier sur les trackers. Ce hash dépend bien sûr du dossier et de son contenu.

Utilise la commande transmission-show perfectly-legal.torrent pour l’inspecter.

Seeder le torrent

Avant de se mettre à seeder, il faut copier notre dossier perfectly-legal dans le dossier de téléchargement de Transmission, sinon le daemon ne se rendra pas compte qu’il peut seeder !

rsync -av perfectly-legal /var/lib/transmission-daemon/downloads/
Tu peux modifier le chemin dans le fichier de conf, clé download-dir 😉.

Puis tu peux lancer le seed :

transmission-remote -a perfectly-legal.torrent

En réalité, cette commande pourrait aussi lancer un leech, si le fichier était hébergé autre part. C’est le principe même des torrents : tu peux être à la fois seeder et leecher.

Ici, Transmission commence par se rendre compte qu’il possède le fichier et en vérifie l’intégrité. Tu peux suivre cette évolution comme ceci :

watch -n .1 transmission-remote -l
    ID   Done       Have  ETA           Up    Down  Ratio  Status       Name
     1   100%   502.4 MB  Done         0.0     0.0    0.0  Idle         perfectly-legal

Dès que tu es à 100%, c’est bon. Transmission annonce alors aux différents trackers qu’il a le dossier et peut le seeder.

Côté client, j’utilise qBitTorrent pour gérer les torrents que je télécharge. Quand j’ouvre perfectly-legal.torrent et que je commence le téléchargement, chaque tracker m’indique un pair. Logique, c’est le serveur depuis lequel le dossier est seedé. Quand je regarde ses informations, je vois :

Pas de surprise, c’est le port sur lequel écoute Transmission, comme on l’a vu lors de l’installation.

Pour être sûr·e que tout est cohérent, si tu attends la fin du téléchargement et que tu relances la commande suivante…

transmission-remote -l
    ID   Done       Have  ETA           Up    Down  Ratio  Status       Name
     1   100%   502.4 MB  Done         0.0     0.0    1.0  Idle         perfectly-legal

Tu vois maintenant que le ratio est à 1.0, c’est-à-dire que tu as seedé l’intégralité du dossier ! 🥳

Conclusion

Ce billet montre juste comment partager un torrent. Le cas d’usage classique est un fichier très lourd à partager.

Mais on peut faire des merveilles avec Transmission, et très simplement ! Par exemple, si tu…

  • Ré-active l’authentification RPC (port 9091 par défaut, à ouvrir),
  • Élargit la liste blanche pour l’authentification (limitée à localhost par défaut),
  • Télécharge sur ton ordinateur le client Transmission,
  • Et te connecte…

Tu as une interface pour contrôler le démon à distance. Et, globalement… ben c’est une seedbox ! 🚀